En recherche d’une excursion hors du commun pour célébrer une occasion spéciale, notre choix s’est arrêté sur la Haute-Route, mythique trajet reliant Chamonix à Zermatt. Le plan était fait: l’année du cinquantième anniversaire d’une des nôtres allait être souligné en grand! Nous étions loin de nous douter que la météo livrerait notre plus grand cadeau : une température ensoleillée, le froid nécessaire à limiter les risques d’avalanches au minimum et par le fait même la plus belle aventure alpine qu’on aurait pu imaginer.

Quelques mois après avoir décidé de notre destination, tous les membres du groupe se rencontrait au Lac Supérieur, question de coordonner les grandes lignes de notre aventure, regarder les cartes, comparer nos sacs à dos et surtout faire une randonnée avec l’équipement recommandé par nos guides sur l’itinéraire du Mont Johannsen. À quelques semaines seulement de notre randonnée, nous sommes tous un peu nerveux devant l’inconnu du périple qui nous attend.

Par ce beau dimanche de mars nous avions rendez-vous à l’hôtel de montagne le Prieuré de Chamonix. Nous avions deux jours sur place avant d’entamer la Haute-Route; c’est à ce moment que nous allons rencontrer nos guides. Histoire de s’acclimater, nous avons opté pour faire la Vallée Blanche comme petite mise-en-bouche. Tout fonctionne à merveille, la météo était de notre côté et la réservation de dernière minute avec la Compagnie des Guides a rendu la coordination très aisée. Pour les néophytes, le parcours de ski de la Vallée Blanche est la descente depuis l’Aiguille du Midi surplombant Chamonix à 3842m sur la Mer de Glace. Nous avons eu droit à une journée fabuleuse sur des conditions de ski variées, mais bien plaisantes. Le tout s’est terminé avec le traditionnel arrêt à la terrasse du restaurant Les 2 Gares.

Au dernier matin avant le départ, nous rencontrons finalement Caroline et Adam George, un charmant couple Suisse-Américain. Ils seront nos guides pour ce voyage tant attendu. Ils suggèrent une randonnée sur les Aiguilles Rouges, sur le flanc Nord de la Vallée de Chamonix. Nous partons du Brévent vers le col Cornu pour monter à l’Aiguille de la Floria. On entame une descente sur la Combe du Pouce puis on montera sous la Tête de Béchay. La descente dans la Combe de Bérard fut superbe, la pente est raide et la neige mordante, s’ensuit la montée au Col de Bérard par une chaleur un peu surprenante. Finalement, nous descendons jusqu’a Buet, de là on reprend le train jusqu’à Chamonix. La journée entière se déroulait sous un soleil resplendissant et omniprésent.

Jour 1

Le jour du départ nous laissons nos bagages qui seront transférés jusqu’à l’hôtel à Zermatt et nous partons avec le seul nécessaire pour les six prochains jours.  Nous prenons l’autobus de la ville jusqu’au Grand Montet, une petite télécabine et une chaise avant la première ascension en peaux vers le Col des Rachasses. La descente sur le glacier d’Argentière est notre première glisse vers l’aventure alpine. Le paysage est grandiose, la météo assure un mélange soleil et air alpin rafraichissants. Après un bon lunch sur un rocher en plein milieu du glacier, nous enfilons nos peaux et montons à notre premier refuge, celui d’Argentière.

C’est une journée plus facile que la veille: nous pratiquons nos conversions avant d’arriver à destination car dans les prochains jours il y en aura de plus en plus, le niveau de difficulté sera aussi plus exigeant. Les conversions sont des virages à près de 180 degrés durant l’ascension avec les peaux d’ascension sous les skis. Cette manœuvre est nécessaire en grimpe pour permettre de pratiquer des Z dans la montagne.

Une fois au refuge, nous passons du temps à nous réchauffer au soleil, faire sécher nos chaussons et vêtements humides tout en regardant les petits avions de touristes qui longent la vallée avant d’entrer pour le souper à peine quelques minutes avant le coucher du soleil.  La soirée ne s’éternise pas, tout le monde est au lit vers 20h30. Dans ce refuge, il fait bien humide et le froid est omniprésent, ce sera le seul refuge que nous trouverons un peu inconfortable.

Jour 2

C’est déjà l’aube et tout le monde est debout pour le petit déjeuner. Après un remplissage des thermos de thé, le groupe se met en route pour la cabane du Mont-Fort. Nous montons au Col du Chardonnet en crampons-bottes puis en ski, pour en redescendre vers la Suisse, bien assurés en rappel, et nous enfilons une longue descente sur des conditions de neige printanière en plein glacier de Saleina jusqu’à Praz du Fort, où un taxi nous attend pour nous amener au pied de la station de ski Verbier (Châble). Une journée de plus sous le soleil ardent en altitude dans les Alpes.

Pour nous rendre à la cabane du Mont-Fort, les installations de Verbier nous épargnent une ascension de près de mille mètres. Happy hour au chaud soleil à 2400m, vue magnifique vue sur le domaine skiable des 4 Vallées (Verbier) depuis la terrasse. Cette cabane offre des chambres à occupation quadruple, comme c’est moins occupé en semaine nous avons chacun notre chambre en plus d’une douche, quel luxe inattendu!

Jour 3

Nous sommes déjà vendredi: deuxième matin en refuge, la routine s’installe et on s’extirpe de nos lits pour être sur le chemin à 8h00 tapantes: c’est presque du luxe de partir si tard! Une fois de plus, Galarneau sera de la partie toute la journée durant. On enfile les cols de la Chaux, de Momin, un petit groupe ira au sommet du Mont Rosablanche (3336m). Pour ceux-ci l’ascension aura été de 1100m, pour le reste du groupe ce sera environ 850m, on aura alors fait quatre transitions (peaux à ski ou l’inverse). La journée termine quand même tôt, vers 14h à la cabane du Prafleuri (2662m) où nous attend un délice alpin à base de pommes de terre et de fromage: le rösti suisse garni d’un œuf et de lard, accompagné bien entendu de 50cl de cervoise locale! Au menu ce soir: un délice de porc aux olives, du bon vin et un sommeil rapide, le tout  bien mérité!

Jour 4

Au troisième matin, pas de temps à perdre: l’ascension doit se faire avant le lever du soleil sur le Col des Roux. Le soleil nous accompagnera à partir du premier lieu de transition, dominant le lac des Dix (sommets). La traverse de 6km nous amène au Pas de Chat après 500m de dénivelé latéral tout le long du lac. Cette traverse à ski est assez exigeante: la pente est très abrupte et toujours en inclinaison vers la gauche. On enfile les peaux et couteaux pour la montée de 543m jusqu’à la cabane des Dix. La chaleur est étouffante pour certains, l’ascension est redoutable dans cette portion de l’itinéraire.

Arrivés à la majestueuse cabane des Dix (2928m), on revient en milieu plus social. C’est samedi, les Suisses adorent y séjourner le weekend: nous sommes à seulement une heure de la station de ski Arolla. Le site permet d’accéder à tant de terrain que c’est un lieu bien prisé. L’ambiance y est conviviale; nos guides et un membre du groupe opteront pour une escapade d’une heure à la recherche de quelques bons virages en neige ramollie au soleil sur un sommet de 300 m à proximité.

Jour 5

Nous sortons en même temps que le soleil au dessus des Pointes de Tsena Réfien. Une courte descente sur une neige durcie par le froid nous mène au pied de la Serpentine. On progressera lentement en peaux, en crampons, encordés sur le glacier. L’itinéraire est assez exigeant, les pentes sont abruptes, on enjambe quelques profondes crevasses mais nos guides savent prévenir les risques et s’assurent que le tout soit fait sécuritairement. Tout au long de notre trajet, nous aurons droit à des périodes d’ombre sous les falaises et montagnes en succession d’exposition au plaisant soleil alpin. Le plaisir est double en rejoignant le Pigne d’Arolla (3796m), par un soleil brillant et un vent qui maintient la température sous zéro. La vue est magnifique et les conditions de neige de la descente jusqu’à la cabane des Vignettes sont impressionnantes. Certaines portions sont bien abruptes mais la neige transportée par le vent aide à bien en gérer le défi. La cabane qui nous abrite pour ce soir est bien serrée entre les sommets et les falaises agressives avoisinantes. On aura droit au meilleur repas de la semaine selon certains, un spaghetti bolognaise et des joues de porc délectables.

Jour 6

Ce matin, la fébrilité est au rendez-vous. Nos guides nous ont bien préparés à cette exigeante journée de plus de 1200m d’ascension en trois étapes qui oscillent entre la Suisse et l’Italie. On initie le déplacement à pieds sur quelques 100m au travers du col des Vignettes, on enfile nos skis pour descendre au bas du col de l’Évêque, puis on monte progressivement, et on redescend au bas du col du Mont Brûlé. L’ascension suivante se fait à crampons sur une face bien pentue, le dernier effort nous mène au col de Valpelline (3554m). Si la journée a commencé avec un vent alpin relativement froid souvent dans l’ombre des rochers, on termine l’ascension en t-shirt au très chaud soleil avant d’entamer notre dernière descente vers Zermatt en passant par Zmuttgletcher. Cette superbe descente de plus de 15km aboutit à Fury en pleine station de ski. On en a profité au sommet pour célébrer amicalement les 50 ans de Renée! La pause champagne et bière est forcément méritée une fois arrivés à Fury après 2 heures de descentes fascinantes.

La Haute-Route nous a permis à tous et chacun de dépasser un ou plusieurs objectifs. Pour certains, c’était un dépassement physique, mental ou technique; pour d’autres une découverte géographique et le défi de vacances enivrantes en altitude. Le périple fut sans équivoque notre plus belle expérience alpine à vie, le groupe d’amis que nous formions au départ n’est que plus fort, riche de l’aventure qui nous unit maintenant.

Ce mythique parcours est différente pour tous, les trajets peuvent et doivent être adaptés aux capacités de chaque membre du groupe qui désire s’y aventurer. La météo doit avoir son mot aussi, si notre expérience fut agrémentée par le soleil et des températures permissives, il serait prudent d’être prêt à vivre une aventure bien différente sous des conditions moins amicales. La montagne garde le dernier mot, peu importe le niveau de préparation. C’est pourquoi il faut être préparé pour le périple et se munir d’un encadrement professionnel afin de s’assurer de prendre les bonnes décisions à chaque instant du voyage. On espère que notre récit saura vous inspirer à aller vivre l’expérience d’une vie de skieur!

Article précédentLe Mont Apic au naturel, 2 février 2020
Article suivantMétéo à la ZoneSki, 6 février 2020: Gens des Cantons, c’est votre tour…
Freddy Jean
Frédéric carbure à rester peu en place et vivre l'aventure tant qu'on le peut. Il partage la passion de vivre son sport et ses loisirs intensément avec ceux qui aiment profiter de la nature et de la faune. Il prone que l’équilibre, c'est travailler fort et savoir jouer tout aussi fort!