Afin de soutenir l’éclosion de projets novateurs pour l’industrie du ski, l’Association des stations de ski du Québec a lancé l’an dernier le concours « Les dragons du ski ». Les stations sont invitées à présenter un projet qui sera rentable, novateur, faisable, viable et durable, tout en contribuant au rayonnement touristique. Un jury décerne une bourse de 10 000 $ afin de soutenir la réalisation du projet retenu. Zone ski se penche sur deux des projets présentés lors de la seconde édition.
Dans la colonne des dépenses liées aux opérations d’une station de ski viennent d’abord, en ordre d’importance, les frais associés à la main-d’œuvre, puis, juste en dessous, la consommation d’énergie. Dans ce contexte, toute réduction de cette consommation se traduit par de substantielles économies pour l’entreprise.
À Bromont, c’est l’incontournable fabrication de neige qu’on a à l’œil pour optimiser le rendement énergétique. Pompes, compresseurs, ventilateurs… ces appareils énergivores engouffrent près du quart de l’électricité qui alimente les stations.
Selon Benjamin Désourdy, directeur entretien et développement de la station, une simple équation mathématique pourrait aider les stations à réduire la consommation d’électricité liée à la fabrication de neige. Avec son équipe, il s’est attelé à trouver la formule de l’IEE, l’Indice d’efficacité énergétique. « L’IEE est un moyen de mesurer la consommation d’électricité lors de périodes de fabrication », en lien direct avec la température wetbulb. Cette températuretient compte de l’humidité de l’air.
L’idée est de trouver à quelle température les appareils offrent le meilleur rendement et ainsi cibler les fenêtres d’enneigement les plus efficaces au cours d’une journée. L’opérateur pourra déterminer la rentabilité de repousser la production, par rapport au coût de la main-d’oeuvre sur place. Une autre application de l’IEE serait de repérer d’éventuelles irrégularités dans le système d’enneigement : si la consommation électrique est bien au-delà de celle évaluée par l’IEE, on pourrait suspecter une fuite ou un bris et réparer rapidement. « On estime qu’on pourrait faire des économies d’énergie de 10 % en ramenant la consommation d’électricité sur la valeur de l’IEE », soutient Benjamin Désourdy.
10 % d’économies est un chiffre qui a visiblement séduit les Dragons du ski. Le projet de recherche a permis à Bromont de mettre la main sur la bourse de 10 000 $ associée au concours lors du dernier congrès de l’ASSQ, qui s’est tenu en juin dernier. La station s’est engagée à partager ses conclusions avec l’ensemble des stations de ski.
Des conclusions qui pourraient arriver assez rapidement, si on se fie au degré d’avancement du projet. En effet, Bromont a commencé à enregistrer ses données de consommation l’hiver dernier. Toutefois, les résultats sont imprécis, probablement à cause d’erreurs à la cueillette. C’est là que l’argent de la bourse entre en jeu. Le dossier a été mis entre les mains du département de génie de l’Université de Sherbrooke. « Durant l’été, on a développé des idées pour avoir des chiffres plus précis avec nos appareils de mesure. » La période de tests à la fabrique de neige, juste avant le début de la présente saison de ski, a été l’occasion d’évaluer ces changements. « Nous mesurons individuellement les performances des équipements afin de diminuer la marge d’erreur », avait alors affirmé Benjamin Désourdy.
« On a accumulé 900 données l’an dernier et on devrait être en mesure de doubler cette quantité, parce qu’on espère faire autant de neige cet hiver que l’hiver dernier », calcule M. Désourdy. Dès lors, il restera aux statisticiens, aussi des spécialistes de l’Université de Sherbrooke, à se pencher sur les données et à tracer la fameuse équation mathématique.
Les autres stations pourront alors s’en saisir et analyser leur performance. Ils connaîtront mieux l’impact de la température au moment de mettre les canons en marche.
Et les skieurs dans tout ça? Au final, ce laboratoire à ciel ouvert pourrait permettre la prolongation de la saison de ski grâce à un enneigement plus efficace, assurer la pérennité de stations de skis par une amélioration de leur performance économique et améliorer l’efficacité énergétique – la cote verte – de l’industrie, croit Bromont.