Le Mont Apic au naturel, 2 février 2020

Le Mont Apic a toujours attiré mon attention. Est-ce le désir de dévaler ses pistes «à pic», de me promener dans ses sous-bois, ou encore de voir de mes yeux comment une montagne au Centre-du-Québec peut encore vivre de la neige naturelle…? Je ne saurais mettre le doigt sur la raison exacte. Toujours est-il que je n’y avais jamais mis les skis avant le dimanche 2 février 2020, même si le centre de ski est seulement à une heure de route de mon domicile.

Passé Plessisville, je suis attentif afin de ne pas manquer le 10Rang, où je dois tourner pour me rapprocher de la station. Finalement, je passe tout droit, faute d’indication. Je me fais une réflexion: «La petite station de 95 mètres de dénivelé est un secret que les gens de coin semblent bien garder, il doit bien y avoir une raison pour ça!» Je rebrousse chemin et prends le fameux 10e Rang, où en peu de temps le Mont Apic se dévoile dans sa splendeur.

Lorsque j’entre dans le chalet au premier étage, le feeling d’être à la fois chez soi et de prendre une bouffée d’histoire m’enveloppe malgré le fait qu’il ait été récemment rénové. La jeune femme à la billetterie, souriante, m’accueille comme si elle m’avait toujours connu. Quelques secondes plus tard, le directeur général, Samuel Bradette, me serre la pince. La question me brûle les lèvres et je ne peux m’empêcher de lui poser: «Comment faites-vous pour survivre avec seulement de la neige naturelle?»

Sa réponse est authentique, à l’image de la station qu’il gère: «C’est sûr que c’est pas facile, dit-il d’emblée. Cette année, nous avons ouvert le 18 janvier. En plus, avec les changements climatiques, les saisons vont raccourcir. Nous n’aurons pas le choix de recourir à la neige fabriquée à court ou moyen terme.»

Mais comme quoi aucun défi n’est à son épreuve, la station – qui n’offre pas de ski de soirée – aura six pistes éclairées le temps d’une fin de semaine pour permettre de skier le jour tombé. Avis aux intéressés: Mont Apic sous les étoiles se déroulera les 14 et 15 février.

Alors que je termine la discussion avec Samuel, mon collègue Michel Longpré me rejoint pour partager la journée avec moi. Pour lui, ce n’est pas la première visite ici. Il m’avait d’ailleurs peint un portrait enviable du Mont Apic, ce qui a ajouté à ma motivation de venir y skier.

Et la découverte commence…

Deux téléskis desservent les 14 pistes et sous-bois. Nous empruntons celui de gauche pour entamer notre journée de ski.

Avant même notre première descente, un patrouilleur nous accoste: «Faites attention, le damage des pistes a été minimal. Vous savez, la couche de neige est pas mal mince, c’est un défi de damer les pistes. Mais comptez sur moi pour venir vous ramasser s’il vous arrive quelque chose!», lance-t-il en rigolant. Ce ton familier, qu’on retrouve dans les stations en région, a quelque chose de réconfortant.

Malgré l’avertissement, Michel et moi trouvons que les conditions sont bien correctes. En fait, le défi du damage des pistes a été relevé avec brio dans les circonstances, malgré certains passages plus bosselés. Mais on comprend bien qu’il est impossible de gratter, faute de quoi on aurait un mélange neige-terre.

Michel dans La Brisson:

Nous allons ensuite découvrir le côté droit de la montagne, et empruntons l’autre téléski. Je m’élance dans La Lafond:

Au Mont Apic, le temps s’arrête. Il n’y a pas de course à vouloir skier avant tout le monde, à se dépêcher pour éviter les files, à se presser pour profiter au maximum de la journée. Ici, on prend le temps de parler en haut des pistes, d’échanger avec les gens du coin, de relaxer. Relaxer. Ce mot existe-t-il encore, même en pratiquant un sport – le ski – qui est supposé nous relaxer?

Nous enfilons les descentes, parcourant la montagne et ses recoins, pour arriver au moment du dîner. Le chalet, rénové, nous accueille dans son décor propre et convivial.

Le ski est aussi un sport coûteux pour les familles. Mais pas ici. Le forfait Famille, par exemple, est ridiculement bas : pour 79,50$ + tx, une famille de 2 adultes et 4 enfants peut skier pour la journée! Il y a aussi «les dimanches des municipalités», où les habitants d’une municipalité environnante, différente chaque dimanche, obtiennent un 50% de rabais sur leur billet de ski.

Après le dîner, je remarque qu’il y a un sous-bois d’ouvert, soit le bas du Fortier. Je décide de m’y aventurer malgré la couverture neigeuse défaillante.

C’est skiable, mais davantage de neige serait évidemment bienvenue. Toujours est-il qu’il semble y avoir plusieurs beaux sous-bois au Mont Apic, mais je devrai revenir une autre fois pour les découvrir.

Le temps s’arrête, que je disais plus haut, mais le temps passe aussi. Après avoir skié environ cinq heures, il temps pour nous de repartir.

Alors, quelles sont, finalement, ces fameuses raisons qui poussent les skieurs du Mont Apic à garder jalousement leur secret? Les pistes inclinées, le peu de skieurs qui fait qu’on ne se pile pas sur les skis, des beaux sous-bois, un cachet qu’on pourrait qualifier «d’historique rénové», le prix des billets de ski… Mais aussi, l’authenticité, la convivialité et, surtout, quelque chose qui s’est perdu dans la majorité des centres de ski contemporains: la chaleur humaine qui, en fin de compte, fait qu’on y vit une expérience tout simplement naturelle.

Bon ski!

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Pierre Pinsonnault
Son intérêt pour la nature et le grand air se décline en deux principales activités : le ski alpin (sa grande passion) et la randonnée en montagne. Rédacteur professionnel dans la vie de tous les jours, et prenant un malin plaisir à photographier les paysages d’hiver et les skieurs lorsqu'il pratique son sport de prédilection, Pierre aime écrire sur le ski et partager ses expériences, photos à l’appui.