La vague de grand froid que nous vivons au Québec au moment de publier ce texte nous plonge dans des températures typiquement hivernales. Sans tomber dans le sensationnalisme des chiffres martelés par les détracteurs de l’hiver, disons que le terme « frette » est quand même approprié! Ces températures très froides provoquent un stress supplémentaire non seulement sur les humains exposés au froid, mais aussi sur toutes les infrastructures, allant des moteurs de nos voitures jusqu’aux routes et ponts, en passant par les immeubles et les systèmes de transport en commun.
Les stations de ski n’y font pas exception et même si les remontées mécaniques, les chalets et les canons à neige sont conçus pour résister aux intempéries, la demande énergétique pour en assurer le fonctionnement bondit lors des grands froids. C’est la raison pour laquelle Hydro-Québec a mis en place l’option de gestion de demande de puissance (GDP), qui a son équivalent pour les clients résidentiels, l’option de crédit hivernal.
Le fonctionnement est très similaire pour les deux options: si les entreprises ou clients résidentiels participants réduisent leur consommation d’énergie dans les plages horaires définies par Hydro-Québec, entre le 1er décembre et le 31 mars, ils obtiennent un crédit à la fin de l’hiver. Pour la clientèle Affaires, dont les stations de ski, les périodes de pointe pour lesquelles une réduction de la demande est souhaitée ne peuvent survenir qu’en semaine, contrairement à la clientèle résidentielle. Hydro-Québec envoie une notification indiquant les plages horaires visées (de 6 h à 9 h le matin, et de 16 h à 20 h en soirée). Si une station de ski choisit de ne pas réduire sa demande lors d’une période de pointe, elle ne sera pas pénalisée dans ses tarifs: elle n’obtiendra simplement pas de crédit pour cette période spécifique.
Pour la plupart des stations, la gestion de demande de puissance signifie un démarrage tardif des remontées mécaniques, ou l’arrêt momentané de la production de neige. Ces deux opérations sont particulièrement énergivores et les crédits obtenus en fin de saison permettent aux stations participantes d’investir en amélioration des infrastructures. Bromont, montagne d’expériences (BME), a d’ailleurs mis en ligne un billet de blogue fort instructif sur les raisons motivant leurs choix. Evelyne Déry, conseillère marketing et communications pour BME, ajoute: « Il est bien sûr avantageux pour nous de participer. Si toutefois nous décidons de ne pas participer à un événement de pointe, c’est uniquement pour des raisons d’expérience client et dans le but de garantir un minimum de service aux skieurs. »
Même son de cloche du côté du Mont Orford, pour qui la participation à cette option coule de source et s’inscrit dans leur désir de modifier les habitudes de consommation. Cette décision est parfois difficile à prendre pour les stations, surtout lors des saisons moins généreuses en neige naturelle, puisque les grands froids sont souvent les meilleures périodes pour la production de neige. Valérie Collette, directrice marketing et communications pour la station, précise que le choix se fait quand même afin de moins affecter la clientèle présente : « Dans la plupart des cas où nous répondons, nous réduisons significativement, voire mettons à l’arrêt complet la fabrication de neige pendant la période demandée ».
Comme les équipements de la clientèle Affaires d’Hydro-Québec sont souvent plus énergivores que ceux présents dans une maison résidentielle, l’option de gestion de demande de puissance comporte un volet additionnel, relatif justement à la puissance de chaque appareillage impliqué. Maxence Huard-Lefebvre, chef média et planification des communications pour Hydro-Québec, nous explique: « Quand un client enregistre une pointe de consommation, il sera facturé en fonction de celle-ci sur la période. Cette composante « puissance » est essentielle, car les équipements des clients requièrent que le réseau électrique soit adapté. Plus les équipements sont puissants, plus ils mettent une pression sur le réseau d’Hydro-Québec et engendrent des coûts. » C’est donc à la fois sur la base de la puissance (mesurée en kW) et de la consommation (kWh) que les crédits sont calculés: plus la demande énergétique est faible, plus importants seront les crédits obtenus.
Selon Isabelle Vallée, cheffe communications et relations publiques au Massif de Charlevoix, la participation à l’option de gestion de demande de puissance mérite une réflexion plus large sur les implications de tous les départements, de même que de la clientèle. Les discussions sont fréquentes à ce sujet afin de trouver des pistes permettant à tous d’y trouver leur compte. « On va toujours chercher à affecter le moins possible les opérations tout en réduisant notre demande sur le réseau d’Hydro-Québec. La meilleure pratique serait d’ouvrir la station après la fin de la période de pointe du matin, ce qui impliquerait de modifier les horaires, d’où la nécessité de le faire en communiquant adéquatement avec la clientèle. » indique-t-elle.
La participation collective à une demande de gestion de puissance d’Hydro-Québec contribue à réduire la demande parfois trop forte pour la capacité du réseau de distribution, en plus de bénéficier aux stations qui y collaborent. Par exemple, pour une station comme le Massif de Charlevoix ou Bromont, montagne d’expériences, les économies réalisées en une saison de ski peuvent dépasser les 30 000$, ce qui n’est pas négligeable lorsqu’on sait que les tarifs sont beaucoup plus élevés pour la clientèle Affaires. En outre, retarder d’une demi-heure ou d’une heure l’ouverture d’une remontée mécanique permet à la clientèle d’éviter la période généralement plus froide en matinée et de commencer son ski alors que les températures sont un peu moins mordantes… c’est donc une solution payante de tous les côtés!