Quand le printemps arrive

Il y en a des plus belles. Il y en a des plus grosses. Il y en a des plus impressionnantes. Mais il y en a guère de plus fantastiques pour célébrer la venue subite du printemps, même quand le soleil tarde à sortir de derrière les nuages. La Réserve est une station qui promet des journées printanières sans foule ni cérémonie. Juste du bonbon. Alors qu’elle tourne le dos au soleil, la station peut profiter de quelques jours additionnels avant que les rayons perçants ne viennent à bout de l’enneigement. On y gagne au change car en effet on peut à la fois profiter de conditions printanières qui s’étirent, tout en profitant des chauds rayons bien assis à la base à observer les skieurs et planchistes. Le meilleur des deux mondes.

Avec quelques pitchs dignes de ce nom qui se drainent bien du surplus d’eau, la glisse se fait rapide et franche. Bien entendu du côté de la piste verte, parfois saturée d’eau, ça ralentit de façon alarmante. Mais comme le dit si bien ce visiteur ontarien en pleine relâche: “Who cares?!” Si tôt au printemps tout est visuellement hivernal, mais dans l’air c’est bel et bien la fin de l’hiver qui pointe son nez. Et avec un billet pour adulte à 25$ on serait fou de tourner le dos au trépignement des bourgeons.

Des activités pour profiter pleinement de la neige

Quatre autobus scolaires se stationnent. Une horde d’adolescents bien ordonnée, mais énergique, en descend. À la location, la file est longue, mais patiente. Tous ne feront pas du ski. Certains chaussent des skis de fond. D’autres se dirigent vers le tubing. Cependant, la majorité est ici pour le ski. Sur le tapis magique et sur la pente école ça rigole solide. Ça tombe. Ça rit. Ça s’amuse. Plus tard, on croise cette joyeuse bande sur les pistes. Faciles à reconnaître, ces ados novices: sans bâtons, ils déferlent comme des chiots tout droit sortis de sous le ventre de leur mère. Un chaos rigolo et titubant qui fait sourire. Dans la piste de tubing, la fête est “pognée” solide. On a juste envie d’aller glisser avec eux. Le soleil n’est pas au rendez-vous à chaque instant, mais ça n’empêche pas une telle journée d’être souveraine en ce printemps précoce. Ces adolescents, je me dis qu’ils vont dormir dans le bus au retour! Plus loin, des randonneurs alpins d’expérience en split boards s’apprêtent à refaire une ascension. L’hiver est loin d’être terminé.

Un domaine skiable sérieux et mémorable

La Réserve offre des pistes et des sous-bois qui mettent au défi même les plus aventureux. N’offrant qu’une seule piste verte de haut en bas (une autre fait la moitié du dénivelé), la station possède des inclinaisons qui permettent aux skieurs intermédiaires de progresser avec de bons défis, alors que les experts peuvent se mesurer aux Chute Libre Haut et Pirouette Haut. Si la glace et les surplombs rocheux ne vous effraient pas, c’est la place où montrer votre savoir-faire. Ou du moins votre audace, faute de talent ou de jugement! Si ce sont les arbres qui exercent la plus forte attraction sur vous, accourez vers les sous-bois dont plusieurs sont sérieusement invitants. Pour peu que frôler l’écorce du bouleau et sentir la sève du sapin ne vous effraie pas.

Même en pleine période printanière les parties les plus difficiles de la montagne conservent un enneigement suffisant. Bien entendu, le Versant Nature perd plus vite ses plumes, alors que le soleil darde ses rayons en plein visage de ces pistes non damées. Peu importe sur quelle piste on pose ses skis ou sa planche, la mollesse des surfaces, même quand elles arboraient hier encore des plaques de glace, promet des virages où on laisse de profonds sillons de carres. La Pirouette Bas, avec sa largeur de boulevard et sa pente soutenue, invite à l’accélération et au long rayon. À La Réserve, c’est tout le domaine qui fait d’un printemps le bonheur d’être sur ses skis et de ne vouloir quitter la station qu’au moment où les jambes flanchent dans la neige devenue lourde. Le genre de sensation qui perdure dans le corps courbaturé et dans l’esprit heureux des efforts fournis sans mesure.

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Patrick Teasdale aime beaucoup jouer dehors. Télémarkeur depuis longtemps, il explore maintenant les possibilités du ski de randonnée alpine. Il troque volontiers sa pagaie groenlandaise ou ses skis pour une tasse d'excellent thé vert japonais. Un brin poète et idéaliste, il ne demande qu'à être émerveillé par une trouée de lumière, un chant d'oiseau ou une lame de neige. Il aime soigner ses chroniques et ses photos.