Doit-on dire «neige artificielle» ? C’est sans hésitation que Charles Désourdy, président et propriétaire Bromont répond : il faut dire de la neige fabriquée! En effet, quelque chose d’artificiel est ce que l’on a reproduit avec une matière autre que celle que comporte naturellement cet objet. Par exemple, un sapin de Noël en plastique plutôt qu’en matière ligneuse. Dans le cas de la neige fabriquée, on ne produit pas de la neige en plastique, elle est faite d’eau comme la neige naturelle. La seule différence est que l’on a modifié sa forme en projetant dans les airs de très fines gouttelettes d’eau qui au contact du froid vont devenir des cristaux de neige fabriqués!

Cette neige fabriquée est  devenue un incontournable pour l’industrie du ski au Québec en 2011. Du nord au sud et d’est en ouest de la province, elle est indispensable. Pour Kary Fiset (Mont Vidéo), l’enneigement va permettre de faire débuter une saison de ski quand la neige naturelle tarde; couvrir une montagne rocailleuse pour Jean-François Thibault de la Station Récréotouritique Gallix; ou garantir des conditions de glisse optimales et ce, peu importe les caprices de dame nature, selon Charles Désourdy. Malgré son omniprésence, cette neige fabriquée demeure très coûteuse à produire peu importe la taille de la station. Qu’il s’agisse du coût de l’achat de l’équipement, son entretien, l’installation des infrastructures permanentes et bien sûr la quantité d’électricité requise pour faire fonctionner les canons et surtout les compresseurs, la facture est toujours imposante. Faisons un petit tour de table: grande station, station de banlieue éloignée, fabricant de neige et petite station locale en région ont tous leur mot à dire sur l’or blanc.

Saint-Sauveur: l’enneigement garant de la durée de la saison

D’entrée de jeu, Christian Dufour, Directeur expérience-client au MSSI, nous a expliqué que la raison première d’une réussite d’une telle durabilité de saison de ski est attribuable au fait que la station a régulièrement investi dans son système d’enneigement depuis les années 1980. À ce jour, la station est dotée d’une très grande capacité de production à la fine pointe de la technologie. Afin d’y parvenir, il faut être sans cesse aux aguets des avancées technologiques dans ce domaine. Ces améliorations ont permis au MSSI de raccourcir le délai d’enneigement de deux pistes de 24 à 12 heures dès qu’une fenêtre de froid se présente. 

Pour remplir l’objectif d’être le premier à ouvrir sa station en saison, il faut être en mesure d’être très performant côté fabrication de neige. Le MSSI compte presque totalement sur cette production pour opérer la station de ski. La direction désire pouvoir offrir une surface de glisse légèrement poudreuse, douce et agréable. Christian Dufour explique qu’il était même question de chercher à briser le mythe voulant que la neige fabriquée soit dure, glacée et couverte de balles de golf. Les avancées technologiques permettent maintenant de présenter un produit de glisse diamétralement opposé au mythe!

Par contre, tout n’est pas question de technologie pour être le premier à ouvrir en saison: il faut être à l’affut de la météo et de la première fenêtre de froid qui va se présenter. MSSI est prêt à répondre de ses canons à neige dès le premier octobre. De plus, c’est aussi une question d’aménagement de pistes au cours de l’été, il faut s’assurer de réparer tous les bris qui auront pu être causés par de l’érosion. Il est aussi nécessaire de surveiller à ce qu’il n’y ait pas de roches qui dépassent dans les pistes, dans ce cas, la station travaille à bien couvrir l’ensemble de son domaine d’une couche d’humus et d’herbe, sans oublier que le mont Saint-Sauveur n’est pas une montagne rocailleuse. Avec ces dispositions, la quantité de neige requise est moins importante au moment où l’on étend de la neige sur une piste. Un autre élément qui aide MSSI est le fait que cette station est située au nord de Montréal, souvent en cas de température limite, on pourra y fabriquer de la neige, alors que cela sera impossible plus au sud. Un dernier détail: peu de temps avant le début de la production de neige, les hautes herbes poussant dans les pistes sont fauchées afin d’éliminer tout arbuste qui aurait pu pousser et constituer un obstacle supplémentaire à couvrir.  Grâce à ces techniques, M. Dufour a déjà réussi à skier la Côte 70 recouverte de seulement deux pouces de neige.

Chaque année, MSSI se targue d’être la station offrant près de 6 mois de ski: les premiers à ouvrir, et les derniers à fermer! Pour accomplir l’exploit de skier si tardivement, parfois jusqu’à la fin du mois de mai, il faut gérer adroitement le stockage de neige dans la piste qui sera choisie pour se rendre à cette date. La machinerie permet d’accumuler de 12 jusqu’à 20 pieds de neige d’épaisseur par endroits. Par la suite, en fin de saison, il faut travailler au minimum la neige en profondeur. En brassant la neige, on la désagrège et celle-ci se transformera en gadoue plus rapidement. En fermant la station en semaine, la neige sera travaillée le vendredi seulement pour offrir une surface de glisse agréable à skier mais qui restera ferme. Quant au parc à neige qui est aménagé au mont Avila au début du mois de juillet, il s’agit d’un vieux truc que les vendeurs de glace utilisaient pour conserver celle-ci et pouvoir en livrer de maison en maison en plein été: tout est une question de bran de scie et de foin combiné à la production d’une quantité importante de neige. À partir du moment où la neige est bien recouverte et isolée grâce à ces matériaux, elle peut se conserver très longtemps. 

En finale, il est possible de noter que pour de nombreuses stations du Québec, la production de neige est devenue un incontournable afin de garantir les opérations; surtout dans un contexte où la neige peut se faire attendre en début de saison ou partir tôt au cours du mois de mars… sans compter qu’il est possible de connaître plusieurs redoux au cours de l’hiver. Cette neige fabriquée permet d’assurer un nombre minimum de jours d’opération ainsi que des conditions de glisse optimales. Pour le plaisir de tous, sa texture de neige tend à s’améliorer, devenant de plus en plus légère et poudreuse au fil des avancées technologiques dans ce domaine. Par contre, il ne faut pas oublier qu’il faut savoir bien calculer et planifier sa production car celle-ci demeure très dispendieuse. Sachant cela, chaque flocon fabriqué saura nous faire apprécier pleinement notre expérience de glisse.

Article précédentEn coulisses: le service à la clientèle
Article suivantBromont, le géant
Dominique Lambert
En bon géographe, Dominique a toujours les pieds sur terre -sauf lorsqu'il skie! Véritable mine d'informations factuelles et historiques, ils partage son savoir quotidiennement grâce à son métier d'enseignant, ainsi que sur notre forum.