La station italienne de La Thuile fait partie du domaine skiable de San Bernardo, et depuis 1984, est reliée à la station de La Rosière, en France. C’est le seul domaine skiable franco-italien dans les Alpes du Nord. Il suffit de traverser la frontière à ski pour découvrir de nouveaux paysages et une autre culture, si proche et pourtant si différente.

Pour y accéder, les aéroports les plus proches sont ceux de Genève et de Turin, mais sachez que l’aéroport de Genève a l’avantage d’avoir des vols directs depuis Montréal. Bien que l’aéroport de Genève soit connecté directement avec la gare ferroviaire, le train ne vous sera pas très utile pour vous rendre dans la Vallée d’Aoste, car le trajet le plus direct est celui qui emprunte le tunnel autoroutier du Mont Blanc. Nous avons donc choisi de louer une voiture à l’aéroport de Genève. Le trajet est de 130 km et prend environ deux heures. 

L’Espace San Bernardo enregistre habituellement des niveaux records de chutes de neige, avec des accumulations de plus de 11 mètres. Cette année, lors de notre visite à la fin du mois de janvier, les températures avaient été anormalement chaudes depuis quelques semaines et les précipitations plutôt rares. Cependant, puisque le domaine skiable varie entre 1400 et 2800 mètres d’altitude, les pistes étaient quand même toutes ouvertes et en excellentes conditions. Seul le domaine hors-piste aurait nécessité de nouvelles chutes de neige pour pouvoir l’apprécier à sa juste valeur. 

Nous débutons donc notre journée à 8h30, au bas des télécabines “Les Suches” dans le petit village de La Thuile. Juste à côté de la remontée, une carte du domaine skiable est affichée et permet de prendre le pouls des conditions météo, du risque d’avalanches, des pistes ouvertes, etc.

Un écran électronique affiche la carte et les dernières informations relatives au domaine skiable.
Dès le début de la journée, nous apercevons de futurs militaires italiens qui se préparent à l’entraînement sur les pistes de La Thuile.

En gros, le plan de match est de se rendre rapidement du côté français et de revenir plus tard sur le côté italien pour terminer la journée.

Au haut des télécabines “Les Suches”, nous empruntons une deuxième remontée, soit le télésiège “Chaz Dura Express” qui nous fait atteindre 2579 mètres d’altitude. Nous débutons la descente par la piste 7 qui nous mène au col du Petit Saint Bernard à 2188 mètres d’altitude. Tout le versant skiable donnant vis-à-vis le col du Petit Saint- Bernard est un territoire essentiellement vierge et sauvage (qui me fait penser un peu aux Rocheuses canadiennes, mais sans les arbres), avec des sommets à perte de vue, qui donnent l’impression d’être rendu au bout du monde. Une partie de ce versant skiable est italien et l’autre français.

Début de la descente vers le col du Petit Saint Bernard, à partir du secteur de La Thuile.

Le col du Petit Saint Bernard est un endroit très spécial, rempli d’histoire. L’importance du col débute dès le Néolithique avec les traces d’un vaste cercle de pierres, ou cromlec’h, qui sont encore visibles aujourd’hui, une fois la neige fondue. En l’an 218 av. J.-C., ce col aurait été le lieu de passage des Alpes par Hannibal et ses éléphants. Par la suite, en 45 avant notre ère, les Romains y construisirent, sur ordre de Jules César, une voie romaine reliant Milan à Vienne. De nos jours, la route du col est empruntée à l’occasion par les cyclistes du Tour de France et du Tour d’Italie. La frontière entre la France et l’Italie passe exactement à la ligne de partage des eaux au point le plus élevé du col.

Le col est également reconnu pour son aérologie auprès des pratiquants de « snowkite ». C’est aussi l’endroit où les hélicoptères prennent les skieurs pour les amener sur les domaines hors pistes en altitude, comme sur le sommet du Ruitor, à plus de 3400 mètres d’altitude.

Nous remontons par le télésiège Piccolo San Bernardo Express. Il nous dépose en territoire français pour la première fois. S’en suit une longue descente facile jusqu’au télésiège Chardonnet qui lui nous remonte jusqu’au Fort de la Redoute à 2390 mètres d’altitude. Le Fort fut le théâtre de plusieurs combats meurtriers lors de la seconde guerre mondiale.

Passerelle pour observer l’immensité du col du Petit Saint- Bernard, au sommet du Fort de la Redoute.
Le col du Petit Saint- Bernard dans toute sa blancheur et splendeur.
Le télésiège Chardonnet vu depuis la passerelle d’observation.
Le plus haut sommet d’Europe, le Mont Blanc, tel qu’il nous apparaît depuis le sommet du Fort de la Redoute.

Du Fort de la Redoute, nous descendons jusqu’à aller emprunter consécutivement deux télésièges à six places pour atteindre le point culminant du domaine skiable, soit le mont Valaisan à 2800 mètres d’altitude. C’est d’ici que débutent de nombreux circuits hors-piste, mais aujourd’hui, les skieurs s’en tiennent à l’unique piste accessible depuis ce sommet, nommée tout simplement “2800”. Lors de cette descente, en empruntant quelques traverses stratégiques, nous arrivons jusqu’au bas du télésiège de Petit Bois à 1530 mètres d’altitude, ce qui constitue une des plus longues descentes possible du côté français.

Vue vers la France depuis le point culminant du domaine skiable, à 2800 mètres d’altitude.
Une skieuse prend quelques instants de repos avant de poursuivre la descente sur le côté français.
Côté français, vue sur l’agglomération de Bourg Saint-Maurice. Remarquez le front de neige qui délimite clairement le changement de température entre le fond de la vallée et les zones en altitude. (Note: ce voyage date de la fin janvier 2024.)
Le bas des pistes, sur le versant de La Rosière. De l’autre côté de la vallée, nous apercevons  une partie du domaine skiable de Paradiski (Les Arcs et La Plagne).
Beaucoup d’activité au bas des pistes, sur le versant de La Rosière.

Le télésiège nous remonte au dessus de la station de La Rosière (secteur Les Eucherts) et c’est ici qu’on rencontre bon nombre de skieurs pour la première fois de la journée. En effet, beaucoup de skieurs, grands et petits sont en apprentissage avec un moniteur dans ce secteur situé directement au dessus du village de La Rosière. L’orientation de ce versant fait qu’il est très ensoleillé et il est parsemé de plusieurs restaurants et refuges de montagne. Si vous voulez manger du côté français, c’est ici que ça se passe.

Restaurant bar Village Igloo.
Restaurant bar Village Igloo.
Restaurant bar Village Igloo.
Restaurant l’Antigel.
Restaurant l’Antigel.

Dans notre cas, nous préférons commencer notre long chemin pour retourner tranquillement du coté italien où nous irons luncher. Pour ce faire, le seul point de passage pour retourner en territoire italien est le sommet du Fort de la Redoute. Une seule piste, forcément très achalandée pendant toute la journée, nous permet de basculer vers le versant du col du Petit Saint Bernard. La piste est assez inclinée et très à l’ombre, ce qui en fait un des rares endroits dans tout le domaine skiable où il faut être vigilant pour éviter les accidents.

Nul besoin de connaître la carte des pistes par cœur, car les indications sur le terrain sont adéquates pour s’orienter et se diriger vers le secteur de notre choix.

Une fois cette descente négociée, nous nous retrouvons finalement face à deux imposantes remontées mécaniques qui semblent avoir défié le temps et qui subsistent telles deux imposantes colonnes de cathédrales. Ce sont des remontées de type “poma” qui vont nous remonter tout doucement, juste assez haut, pour reprendre une piste vers le col du Petit Saint Bernard où nous arrêtons pour prendre notre dîner.

La station aval des remontées de type « poma ».
La station aval des remontées de type « poma ».
Vue sur les remontées de type « poma » qui permettent de ramener les skieurs vers le territoire italien.
De par leur faible débit de skieurs, les remontées de type « poma » donnent accès à de longues pistes faciles qui ne sont jamais achalandées.
La fin de notre descente vers le col du Petit Saint- Bernard.
Notre restaurant, où nous avons savouré de délicieuses pizzas.

De retour sur les skis après le dîner, au col du Petit Saint Bernard, nous décidons de continuer à descendre vers le village de La Thuile, en empruntant les pistes 26 et 7. La descente est littéralement sur la route ensevelie de neige, qui l’été permet aux voitures de franchir le col. Tout au long de cette route, on y croise des restaurants/refuges qui semblent tous plus invitants les uns que les autres.

Les restaurants le long de la très longue descente sur les pistes 26 et 7.
Certains de ces restaurants ont même tout ce qu’il faut pour vous ramener au village de La Thuile, une fois la noirceur venue.
En skiant la route, jusqu’au village de La Thuile.
Retour vers le village de La Thuile.
La dernière descente, qui nous ramène à seulement quelques mètres de notre voiture.

La descente et la journée se terminent ainsi, à seulement quelques mètres du stationnement. L’itinéraire de la journée nous aura permis de parcourir de très grandes distances à ski, et c’est ce que j’ai particulièrement aimé. Tous les versants furent explorés, mais seulement une partie des toutes les pistes auront été parcourues. Une deuxième journée de ski permettra éventuellement de mieux approfondir nos secteurs préférés et de découvrir de nouveaux restaurants à même les pistes.

Quelques observations :

  • Les pistes du côté italien (La Thuile) sont généralement beaucoup plus à l’ombre que les pistes du côté français (La Rosière) qui profitent du soleil de l’après-midi.
  • Les pistes du côté italien me sont apparues moins achalandées que celles du côté français. Peut-être dû au fait que l’hébergement me semble plus limité du côté italien? N’oublions pas qu’il y a un Club Med à La Rosière au bas des pistes.
  • Les distances parcourues d’un bout à l’autre du domaine skiable sont impressionnantes : Par exemple, il faut emprunter au minimum 4 remontées mécaniques différentes pour passer du village de La Thuile au village de La Rosière.
  • Le secteur qui m’a le plus impressionné est celui du col du Petit Saint Bernard, tant par ses panoramas grandioses que par l’unicité du site.
  • Pour entrer en voiture dans le Val d’Aoste depuis Genève, le tunnel du Mont Blanc se franchit à fort prix, soit 67,50 Euros pour l’aller-retour. À ce prix spécial, notez que le retour doit être effectué au plus tard 7 jours après l’aller.
  • Avec une voiture, il est facile de se trouver de l’hébergement relativement abordable dans les petits villages italiens du Val d’Aoste. Par exemple, si vous logez à Pré Saint Didier, vous n’êtes qu’à 5 km de la station de La Thuile et à 10 km de la station de Courmayeur. 
  • Le petit village de Pré Saint Didier possède une source thermale qui peut s’avérer être une expérience agréable après une journée de ski.

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David Lemieux
Skieur autodidacte depuis le début des années 80, il slalome les stations en solo, entre amis ou en famille en quête de pur plaisir. Amateur de premières traces, il est habituellement sur les pistes de bonne heure pour savourer les meilleures descentes de la journée : "Rien ne sert de courir; il faut partir à point!"