Technicien en affûtage des skis et conseiller aux ventes dans une grande chaîne de boutiques de sport, Yanick témoigne des heures supplémentaires qu’il doit “se taper” depuis le mois d’août. Il commence à être essoufflé. La pénurie de main-d’œuvre se fait sentir dans tous les domaines de l’économie. Comment s’en tirent les stations de ski? Que font-elles pour pallier la situation? À quoi devons-nous nous attendre? Nous avons interviewé des cadres dans plusieurs stations de ski afin de prendre le pouls de la situation. Le bilan que dressent ces administrateurs n’est pas inquiétant. Au contraire, il est même rassurant malgré les énormes défis auxquels font face les stations. Aucune panique à l’horizon. Comme vous le verrez dans les prochains paragraphes, les stations sont en mode solution. Elles sont véritablement à pied d’œuvre!
Alors, du personnel, il en manque ou pas?
D’entrée de jeu, les personnes interviewées pour cet article font toutes état d’un contexte de main-d’œuvre qui leur permettra d’être en opération cet hiver. C’est déjà ça de pris! Par contre, maintenir une offre de services à la hauteur de nos attentes les met fortement au défi. Presque toutes les stations sont activement engagées dans des rondes de recrutement intensives. Ainsi Magali Gagné, adjointe à la direction générale à Vallée-du-Parc, mise beaucoup sur leur journée carrière, qui se tiendra début novembre, afin de combler plusieurs postes vacants. Pour la plupart des stations, cela se passe donc plutôt bien, même si le nombre de postes à pourvoir ne permet pas encore de s’asseoir sur ses lauriers. C’est ainsi que pour le Parc régional de Val d’Irène, le recrutement des moniteurs pour l’école de glisse demeure “le talon d’Achille”, selon Lise Tremblay, directrice générale. Elle souligne que “le recrutement n’a pas été de tout repos cette année”. Cependant, Madame Tremblay est maintenant satisfaite qu’elle et son équipe aient réussi à “réunir une équipe formidable” en misant, entre autres, sur des horaires flexibles. À moyen terme, Val d’Irène travaille sur l’automatisation afin de pallier le manque de personnel.
Des solutions
Alain Tremblay, directeur général au Valinouët, est heureux de pouvoir compter sur un bassin de jeunes de 15 à 18 ans qui permet à la station de bien fonctionner. Evelyne Déry, conseillère marketing et communications chez Bromont Montagne d’Expériences (BME), raconte comment la station joue d’originalité: les entrevues avec des candidats à l’embauche ont lieu en télécabine! Ce n’est pas tout, les 20 premiers candidats ont reçu chacun une paire de billets de ski. Attendez, ça va encore plus loin! En collaboration avec l’organisme Pleins Rayons, BME étudie la possibilité d’intégrer au sein de son personnel des personnes ayant un déficit intellectuel ou un trouble du spectre de l’autisme.
Dans les cas où des postes clés demeurent non comblés, des employés pourraient être appelés à faire du temps supplémentaire ou à travailler dans un département ou service autre que le leur. En effet, aucun secteur d’emploi en station de ski n’est épargné. Tous mettront l’épaule à la roue.
Des impacts pour les visiteurs en station
Selon les personnes que nous avons interviewées, la question des impacts varie d’une station à l’autre. Notons au passage que toutes les stations ont exprimé un objectif commun, soit celui de maintenir le plus de services possible. Malgré cela, il faut s’attendre à certaines modifications, voire des réductions, dans l’offre de services de plusieurs stations. Ainsi, Madame Déry fait état de la possibilité de fermer des points de restauration durant les périodes moins achalandées. De son côté, Vallée-du-Parc fermera les dimanches et lundis soirs. De plus, le menu sera simplifié au resto-bar et à la cafétéria. Bien que certaines stations ne songent pas à augmenter le prix des billets à court terme à cause de la pénurie de main-d’œuvre, d’autres pourraient se voir dans l’obligation de partager les coûts dûs aux augmentations de salaire avec les usagers.
Un contexte favorable pour les employés
Les employés sont dans un contexte qui leur est favorable. Selon Evelyne Déry, “la mobilisation et la rétention de nos employés sera au centre de nos préoccupations dans les prochaines années. Nous devons être à l’écoute et continuer d’innover en travaillant l’expérience candidat et employés.” On ne peut se le cacher, les employés ont davantage d’options, ils négocient de meilleures conditions de travail, ils choisissent des horaires qui leur conviennent, etc. Les stations doivent offrir des conditions et un milieu de travail attrayants et souples. Ainsi, au Valinouët on mise “sur la bonne humeur, l’écoute et la conciliation.” À Vallée-du-Parc, l’administration est en train de revoir la gamme d’avantages offerts à ses employés afin de la bonifier, tout en révisant ses grilles salariales.
Compréhension ou appréhension?
Les stations s’attendent à ce que la clientèle soit au rendez-vous et qu’elle fasse preuve de compréhension. En effet, la saison dernière a été la première de l’histoire à devoir composer avec des contraintes sanitaires; cela s’est bien passé. Les cadres reconnaissent d’emblée la collaboration et la compréhension de tous les visiteurs. Ainsi, ils s’attendent à la même réponse positive et enthousiaste de la part de leur clientèle cet hiver.
Une situation permanente?
Bien malins ceux qui pourraient prédire l’état de la situation dans le futur. Magali Gagné a une perspective intéressante à ce sujet. “Je crois qu’un bon travail de notoriété, de référencement et une refonte de nos avantages et de la grille salariale aideront grandement (à réduire la pénurie de main-d’œuvre). Cependant, je pense que nous serons toujours un peu désavantagés par notre saisonnalité.”
Les propos d’Alain Tremblay démontrent le désir de sa station de voir la situation s’améliorer: “Je suis persuadé que nous ne pouvons plus obtenir les mêmes résultats qu’avant avec les “manières” d’avant. Notre monde change, les employés forcément aussi. Aux employeurs d’innover et de s’adapter à la nouvelle donne!” De son côté, l’équipe de Lise Tremblay songe à transformer les activités de Val d’Irène afin de devenir une destination quatre saisons. Selon elle, cela faciliterait la rétention du personnel en leur assurant un emploi annuel stable.
Au final, ce n’est pas si mal!
La saison de ski qui s’amorce est prometteuse, tant du point de vue sanitaire que de celui de l’emploi. Les stations sont véritablement à pied d’œuvre en s’efforçant de réduire au minimum les impacts du manque de personnel. L’Association des stations de ski du Québec (ASSQ) a d’ailleurs mis la main à la pâte afin d’aider les stations de ski et les chercheurs d’emploi à se rencontrer, par le biais d’une initiative de l’industrie touristique: visitez https://monemploientourisme.com/ pour voir les offres d’emploi en station de ski.
De notre côté, les skieurs et planchistes, notre meilleur atout demeure la collaboration. Si vous cherchez un emploi, vous savez maintenant de quel côté regarder. Les stations vous ont déroulé le tapis rouge!